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La première lecture et l’Évangile partagent le
même décor dans leur mise en récit. Ce décor est la prière. Abraham a reçu les
promesses de Dieu dans une vision, c'est-à-dire un climat de prière qui est un face
à face avec Dieu, une rencontre. Ce climat laisse Abraham voir la présence
de Dieu qui traverse le temps. La promesse de descendance emporte Abraham à
l’avenir qui lui échappe : « Regarde le ciel, et compte les
étoiles, si tu le peux…Vois quelle descendance que tu auras ! » (Gn
15,5-8). Elle lui rappelle le passé où Dieu l’a fait sortir d’Our en Chaldée et
où la promesse de la terre lui avait été révélée. Ce qui lui fait lier ce passé
et cet avenir c’est la foi : « Abraham eut foi dans le
Seigneur et le Seigneur estima qu’il était juste ». Nous voyons que
d’une part, Dieu se révèle et révèle sa grâce, et d’autre part Abraham réponde
par sa foi. La grâce et la foi font contenu de la prière, de cette rencontre.
Dans le cadre de cette rencontre que se comprend
ce que l’on appelle l’Alliance entre Dieu et Abraham. Avant que cette alliance
ne soit destinée à l’ensemble d’une collectivité, c'est-à-dire le futur peuple Israël,
cette alliance s’est faite entre Dieu et une personne choisie. Tous les deux se
donnent et tous les deux ont besoin de garder ou de conserver ce lien. Il leur
a fallu que ce lien soit institué. Dieu et Abraham ont décidé de se faire
alliance dans la quelle chacun va marquer sa signature. Le sacrifice que donne
Abraham est la marque qu’il donne à cette alliance. De sa part, Dieu l’a
confirmée en donnant aussi sa signature, celle d’agréer le sacrifice
d’Abraham : « … Alors un brasier fumant et une torche enflammée
passèrent entre les quartiers des animaux ». A l’époque passée nos parents
se disaient, il faut se marier d’abord, l’amour va venir après. A notre époque,
nous nous disons que ce qui nous est important c’est d’abord l’amour, le
mariage peut venir après. L’Alliance entre Dieu et Abraham nous laisse entendre
que ces deux idées sont handicapées. Elles sont handicapées parce qu’elles
relativisent soit l’amour soit le mariage. L’alliance entre Dieu et Abraham met
en exergue l’amour d’une part et l’alliance d’autre part. Si on dit qu’il nous
suffit l’amour, on va accepter que lorsqu’on ne s’aime plus, on se séparera.
Pourtant, le véritable amour nécessite que notre amour soit institué.
L’Alliance donnera le cadre, la forme à l’amour pour qu’il grandisse et achève
sa plénitude : c’est porter le fruit en abondance.
Jésus, quant à lui, s’est transfiguré aussi dans
le même climat : « Il prit avec lui Pierre, Jean et Jacques, et
il alla sur la montagne pour prier »
(Lc 9,28-36). Le geste de Jésus rappelle déjà aux disciples
l’alliance entre Abraham et Dieu. Comme Abraham, dans sa prière, Jésus fait
participer toute l’histoire, toutes les expériences du passé, du présent et du
futur de son peuple. Jésus porte en lui non seulement l’espoir d’Israël à l’accomplissement
des promesses, mais aussi les déchirures, les blessures de ce peuple : dans l’expérience des
occupations des peuples étranger, dans son propre infidélité. Jésus porte en
lui en tant qu’homme son angoisse, peut-être son incertitude de l’avenir de sa
mission : vis-à-vis ses ennemies, vis-à-vis ses disciples qui ont du mal à
le bien comprendre. La figure de Moise et d’Elie, deux personnages importants
de l’Ancien Testament, manifestent la mémoire de Jésus au passé d’Israël et
aussi au passé de toute l’humanité. Ce passé est marqué par le péché et
l’infidélité à l’Alliance. Il est marqué aussi par l’espoir de la libération.
Ce passé est lié à l’histoire de Moise et d’Elie, éprouvés par l’infidélité et
la trahison d’Israël. Ce passé n’est pas déconnecté, cependant, de la victoire
de ces prophètes qui ont su garder avec fidélité l’Alliance avec Dieu malgré
leurs souffrances.
Nous voyons donc que Jésus, dans sa prière, côtoie
son père, en faisant intervenir aussi tous les saints, tous les prophètes. Sa
prière est nourrie de sa proximité avec l’Écriture. Il priait avec les prières
de gémissements et d’espoir de Moise et d’Elie. De leur expérience, qu’il a
trouvé espoir, consolation et force pour pouvoir accomplir sa mission malgré la
souffrance qui va s’annoncer.
La prière chrétienne est la prière de Jésus,
c'est-à-dire à la manière de Jésus. Elle
est toujours une mémoire de l’Alliance, tout d’abord entre chacun de nous avec
Dieu. Dans la scène de la transfiguration, nous contemplons la plénitude de
l’Alliance, qui n’est plus marquée par le sang des animaux, mais par son propre
sang livré bientôt à la prochaine pâque. En lui, cette alliance prend aussi son
sens singulier. En ce sens qu’elle est un rapport intérieur entre homme
individuellement et Dieu. Cette alliance met nous en garde du danger de mass
qui ne nous permet pas d’entrer dans l’intimité avec Dieu. Parce que tout le
monde se rende à l’Église pour recevoir les cendres, moi aussi je m’en y vais.
C’est l’exemple connu de nous tous d’une foi de mass au Cameroun. Notre
foi devient, par conséquent, une foi flottante.
La prière chrétienne n’est pas seulement
singulière, mais aussi particulière. Cette particularité se trouve dans le fait
que lorsqu’on prie, on demande ou invite Dieu à nous habiter. « Maître, il
est heureux que nous soyons ici : dressons trois tentes : une pour
toi, une pour Moise, et une pour Elie ». On croit souvent que passer
plusieurs heures de prière et multiplier la quantité de prières déterminent l’efficacité
de la prière. En fait, on se trompe. Une telle façon de prière, à mon avis,
n’est pas une véritable rencontre avec Dieu. Elle est plutôt une invasion.
Pourtant, comme dit Pierre, on doit se laisser habiter par la présence de
Dieu : « Il est heureux que nous soyons ici ». Autre chose
trouve un temps et une durée nécessaire pour la prière, autre chose passer des
heures et prononcer innombrables prières avec un cœur qui veut truquer Dieu.
La particularité de notre prière est mise au clair
par le rapport filial entre Jésus avec Dieu son Père. Dans la scène de la transfiguration,
nous contemplons le véritable rapport entre Dieu et Jésus son Fils dans
la voix de la nuée : « Celui-ci est mon Fils, celui que j’ai choisi,
écoutez-le ». Nous sommes tous enfant de Dieu en Jésus. Devant un tel
Dieu, on ne peut pas faire le truquage, ni envahit avec la quantité de nos
prières celui qui sait dont nous avons besoin. Nous sommes enfants de Dieu à la
manière de Jésus, c’est d’écouter Dieu en écoutant Jésus. Quand on prie, on
laisse Dieu tout d’abord parler en nous à travers son Fils. Jésus il a choisi
d’écouter et d’obéir à son père qu’écouter ses propres désirs. De cette écoute
là que Jésus a eu la force pour accomplir sa mission.
La singularité et la particularité de notre prière
chrétienne nous ouvre à l’universalité. Jésus, de manière explicite, nous
apprend d’appeler Dieu notre père. Le mot notre montre que, pour
reprendre le Pape Benoît XVI lorsque on prie, en réalité, on n’est jamais seul,
même si on peut se trouver seul en train de prière. Pourquoi on n’est jamais
seul ? Parce qu’en appelant Dieu notre Père, on fait
participer tout le reste du monde comme nos frères et nos sœurs dans le Christ,
y compris ceux qui ne partagent pas la même foi avec nous (les musulmans, les
bouddhistes, les hindoues, etc.…). Cette convocation condition déjà par la
suite notre volonté de pardonner ceux qui nous ont offensé, c'est-à-dire nos
ennemies.
Enfin, la scène de la transfiguration nous rappelle la singularité, la
particularité et l’universalité du salut en Jésus. Jésus a porté à la porte de
tout homme le visage resplendi de Dieu le Père. Notre prière et notre liturgie
chrétienne sont la prolongation de ce mystère de l’incarnation dans toute
l’histoire. Donc elle nous fait envisage l’avenir. Elle doit, par conséquent,
nous transfigurer et nous transformer d’un homme de peur en un homme de foi,
d’une personne triste en une personne joyeuse. Nous sommes tous des porteurs et
des porteuses du visage d’amour de Dieu au monde pour transformer notre
histoire. (Tardelly,s.x.)
la foi, l’œuvre, la raison |
Notre liturgie de ce
premier dimanche de carême est marquée par l’appel ou l’élection définitive de
nos catéchumènes en vu du baptême qu’ils recevront à la veille pascal. Le temps
de carême nous fait revivre les quarante années de l’itinéraire d’Israël à
travers le désert. C’est une aventure douloureuse qui nous rappelle la longue
marche des hommes en quête de l’avenir, c'est-à-dire le bonheur. Les lectures
de 5 dimanches nous mettent au cœur du mystère de ce temps : la rencontre
avec Dieu en Jésus notre avenir. Les premières lectures de tous ces dimanches
nous rappellent la montée de l’humanité vers cet avenir qui est la Pâques du
Christ, en commençant avec l’histoire d’alliance, celle des patriarches et
celle des prophètes. On sent que toute l’humanité languit à toucher par la main
cet avenir. Les lectures des évangiles se répartissent en deux séries. La
première série couvre deux premiers dimanche, mettant en scène les récits du
jeûne de Jésus et de la transfiguration. La deuxième série concerne normalement
ce que l’on appelle les évangiles des « scrutins » comme préparation
du baptême. Les catéchumènes sont invités à s’identifier à la Samaritaine (qui
a soif de l’eau vive), à l’aveugle née (qui attend l’illumination) et à Lazare
(qui attend la libération de la mort).
Entrons donc le message
clé de l’évangile de ce premier dimanche (Lc 4,1-13). Saint Luc nous dit
qu’après son baptême, Jésus, poussé par l’Esprit, jeûna pendant quarante jours
au désert, et il fut tenté par le démon. Le baptême de Jésus, ne le privait pas
des tentations. Son baptême, par contré, l’a mis à la porte des tentations,
mais non sans armés. Le baptême lui a permis d’y faire face. Nous avons écouté
qu’il y a trois tentations. La première, c’est « vivre aux bras
croisés », c'est-à-dire de pas travailler. Satan dit « Si tu es Fils de Dieu, ordonne à
cette pierre de devenir le pain ».
L’acte d’ordonner ou de commander est un acte qui n’engage pas le sujet
dans sa réalisation. Ordonner c’est parfois s’assoir aux bras croisés. La
deuxième tentation, c’est le pouvoir
ou la force à dominer ou avoir pris sur les autres. Pour ce faire, on cherche à
justifier tous les moyen possibles même s’ils ne sont pas bon, par exemple, la
corruption, la tricherie, le truquage, etc.. Le but ultime de cette quête du
pouvoir c’est qu’on soit l’objet d’adoration. « Tout le pouvoir du monde
te sera donne, si tu te prosternes devant moi ». C’est presque un culte de
célébrité. La troisième tentation c’est « vivre la foi sans raison ou avec une raison manipulatoire ».
Notre foi en Dieu ne s’oppose pas à la raison. Dieu nous donne la raison pour
pouvoir vivre et survivre. Vivre la foi sans raison c’est croire aveuglement.
Il ne suffit pas par exemple, de passer des heures de prier sans faire marcher
la raison avec la quelle on devrait bien travailler pour gagner le pain
quotidien.
Face à ces trois
tentations, les réponses de Jésus sont claires.
A la première tentation, Jésus s’oppose en mettant en valeur la vertu du travail. L’homme doit
travailler, mais pas pour travailler, ni seulement pour le pain ou ses besoins
physiques, mais aussi pour son bonheur. Or le bonheur nécessite aussi la
nourriture spirituelle, qui est celle de l’écoute de la Parole de Dieu. On ne
peut pas écouter la voix du Seigneur, si on ne sait pas se calmer ; on ne
peut pas non plus comprendre sa Parole si on ne lit jamais la Bible. Le temps de
carême nous invite à investir le temps nécessaire pour la prière et la
méditation de la parole de Dieu.
A la deuxième tentation,
Jésus s’oppose en donnant le vrai sens
du pouvoir qui est la responsabilité et le service. On est grand quand on
est disponible à servir sans condition et gratuitement. Le carême nous invite à
se mettre au service des ceux qui sont dans le besoin, les plus petit de nos
frères, les pauvres, les malades, les marginaux de notre milieu. A la troisième
tentation, Jésus s’oppose en faisant appel à une foi vécue avec la raison. On ne respect pas Dieu en vivant une
foi aveugle. Au contraire, on le respect mieux si on met en œuvre la raison
illuminée par la foi. Il ne suffit pas de faire la novene pour se dégager de la grippe, du mal au
ventre, ou du cancer. Il faut les soigner au dispensaire, il faut aller voir
les médecins. La prière nous aide à persévérer dans la douleur pour enfin
guérir.
On peut résumer les trois
oppositions de Jésus aux tentations du démon en trois mots clés : « la foi, l’ouvre et la raison ». La foi doit être nourrie par
la prière et par l’écoute de la parole de Dieu. Cette foi, à son tour va
nourrir l’œuvre, c'est-à-dire notre travail. Notre jeûne nous demande à
continuer à travailler comme une expression d’amour envers Dieu et envers nous
même. La même foi va illuminer la raison pour pouvoir discerner le bien et le
mal. Nous savons que le mal ou le démon peut se parer ou s’orner des couleurs du bien. La confession
est le moyen extraordinaire pour dévoiler le mal et les mensonges dans notre
vie. Ces trois mots clés sont donc les trois efforts qu’il faut mener dans
notre combat contre le mal, le combat qui a lieu surtout dans notre vie
intérieur, dans notre cœur. Prière, jeûne et la charité comme doivent être vécu
avec ces trois attitudes pour bien célébrer la Pâques.
Pour nous les chrétiens,
enfin, le véritable exorcisme c’est notre baptême. Pourquoi ? Parce que
Jésus a vaincu le mal en obéissant à Dieu jusqu’à la croix. L’évangile nous dit
que le démon s’éloigne, prend fuite jusqu’au moment fixé pour le tenter. On
verra dans l’épisode de Gethsémani où Jésus est en peu hésité d’accomplir sa
mission. Il sera tenté même jusqu’aux dernières minutes lorsque le soldat lui
demandera de descendre de la croix, ce qui lui est très possible. Mais, il a
choisi à aimer Dieu jusqu’au bout de feu. C’est la grâce que nous dévons demander :
la fidélité de croire en Jésus notre seul avenir dans notre combat contre le
mal de chaque jour. N’ayez pas peur du démon, parce que Dieu est avec nous
comme nous dit le psaume 90 « Puisqu’il s’attache à moi, je le délivre ;
je le défends, car il connaît mon nom. Il m’appelle, et moi, je lui réponds ;
je suis avec lui dans son épreuve ». Je vous souhaite une très bonne
aventure pour ce temps de carême. (Tardelly,sx)
copyright@anita |
Le récit de l’appel
des quatre premiers disciples de Jésus marque le dernier dimanche avant le
début du temps du carême inauguré par le
mercredi de cendres. Pour nous les chrétiens, dans notre vocabulaire, s’insère ce
mot, « appel ». Qu’en est-il de particulier ? Tout d’abord, regardons
minutieusement l’histoire de cet appel
(Luc 5, 1-11).
Jésus est
revenu à nouveau en Galilée, après être rejeté à Nazareth, où il n’opérait
aucun miracle à cause de l’incrédulité de siens. Dans cette ville, il continue
son travail, il enseigne dans les synagogues, il guérisse les malades. Jésus s’est
rendu compte qu’il était impossible de travailler seul dans le vaste champ du
royaume de Dieu. Il a besoin de
collaborateurs, donc des disciples. Pendant qu’il enseigne la foule au bord du
lac Génésareth, il a vu deux barques et deux pécheurs qui venaient d’en
descendre. Comme d’habitude ces derniers lavaient leurs filets. Semble-t-il qu’ils
n’ont rien pris pendant la nuit. C’est pour cela ils ne faisaient que laver
leur filets. C’est vraiment la vie quotidienne d’un pécheur. Jésus est allé à leur rencontre. Son appel s’inscrit
dans la vie quotidienne. Jésus qui a pris l’initiative. Son appel veut faire contenu de cette vie
quotidienne, pour que celle-ci ne devienne pas un sans aucun sens, comme une barque
vide.
L’appel de
Jésus est ensuite marqué par quelques mouvements : Premier, sa montée dans
la barque de Simon, l’éloignement avec Simon, l’enseignement à partir de la
barque. Nous sentons comme s’il y avait
une sorte d’intimité. Jésus prend Simon
à l’écart, se distancie de la foule pour pouvoir les instruire. Cette mise à l’écart
n’est pas sans la barque. Arrêtons-nous à ces mots très symboliques chez Luc :
barque. Elle n’est d’autre que l’Eglise ou le nouveau peuple de Dieu. En privilégiant
Pierre, Jésus annonce déjà sa tâche
future. Pourquoi Pierre ? N’oublions pas que dans la bible, le choix d’une
personne ne signifie pas l’exclusion de tout le reste, mais par contré le choix
pour tout le monde.
Le dialogue de
Jésus avec Pierre précise la tâche. Jésus demande à Pierre d’avancer en eau
profonde, et de lâcher les filets pour la pêche. Pierre essaie de résister que,
lui et ses compagnons, ils ont peiné toute une nuit sans pêcher aucun poisson. Toutefois,
il a exécuté la demande de Jésus tout simplement par conviction de la parole de
Jésus sans se rendre compte du malentendu concernant le sens de cette demande. Le
résultat est étonnant : la multitude de poissons, jamais vue jusque là. Il
y a trois nouveaux mots qui s’y surgissent, à savoir l’eau, le filet et le
poisson. L’eau du lac ou de la mer, dans le langage biblique symbolise le
pouvoir du mal. Jésus dans son Eglise a vaincu le mal. L’Eglise en Jésus Christ
instruit l’humanité pour pouvoir la libérer du mal. Le poison en multitude c’est
l’ensemble des chrétiens baptisés qui ont cru à l’enseignement de Jésus se font baptisés.
La réponse de
Pierre dans ce même dialogue mérite d’avoir plus d’attentions : « Maitre,
nous avons peiné toute la nuit ». Elle est une résistance à double volet. La
première, je pense, est celle de notre
monde aujourd’hui, marqué par l’agnosticisme, fruit du progrès d’haut
vitesse. Beaucoup de gens ne croient
plus en Dieu ; les églises dans le vieux continent sont vides et ne sont
fréquentées que par les vieux. Le retour des religions à travers le phénomène
de New Age, dont parlent les sociologues, en réalité, n’est pas le progrès de la foi ou de la vie spirituelle,
mais plutôt la nouvelle idolâtrie qui consiste à institutionnaliser l’idée
personnelle de divinité. Si on parle du marché de religions, c’est parce qu’il
s’agit des dieux inventés par les hommes en vente dans l’étalage du monde
modern.
La deuxième résistance
est celle des chrétiens tant les pasteurs que les laïcs qui se sentent
découragés par la première résistance. Les chrétiens se résistent à Dieu qui ne
s’est jamais découragé par quoi que ce soit. On se plaigne de nos formations paroissiales
de moins à moins fréquentés par nos chrétiens ; on se plaigne de nos
autorités ecclésiales qui ne vivent pas leurs vocations prophétiques ; on
déplore la décroissance de nombre de vocations ; on lamente des abus
commis par nos autorités ecclésiales. Tout cela nous laisse pense que ça ne
vaut plus la peine d’annoncer le Christ. De plus, il semble qu’on perd le
terrain, envahi déjà par la culture agnostique, favorisée par la montée de la
techno-science.
Comme une épée
à double tranchante, la Parole de Jésus est intervenu au milieu de nos
résistances : « avance en eau profonde, et lâchez vos filets pour la
pêche ». Son appel se fait entendre dans notre vie désespérée. Jésus nous invite à avoir foi en Lui et en sa
Parole. Seul dans sa parole que nous avons la vie en abondance. Comment cela
est possible ? Jésus nous demande d’aller « en eau profonde », c'est-à-dire,
tout d’abord en nous attachant davantage à Jésus. Il nous faut entrer dans une
relation plus profonde avec Lui à travers l’écoute et la pratique de sa parole.
Cette écoute va nourrir notre prière et qui se réalise dans l’action. Après intérieurement entrer en nous même
illuminé par la parole, nous sommes ensuite appelés à entrer dans la réalité
des hommes où Dieu n’est pas connu. Cela n’est possible qu’en restant dans la
barque, c'est-à-dire dans l’Eglise où tous les chrétiens s’entraident. En cette
année de foi, l’appel à la foi est un appel à la communion de tous les
chrétiens. Malgré la résistance de l’homme,
l’Eglise aujourd’hui, continue, à travers plusieurs manières, à dialoguer avec
le monde pour pouvoir proposer le Christ. Nous sommes contents de la présence
de l’Eglise dans les médias contemporains
dans le débat public en vue du bien commun ; de ses engagements dans
la justice sociale et le droit de l’homme. Cette fois-ci, l’Eglise se rende
compte que, ce n’est plus le nombre de poissons qui compte -parce qu’elle en
aura toujours-, mais plutôt le poids et
la taille, c'est-à-dire la qualité de la foi des chrétiens.
L’appel est un
mot cher pour nous les chrétiens. On n’a pas que le bonheur. Si on ne cherche que le bonheur, rien ne nous
différentie du reste du monde. Ce bonheur, pourtant, est conditionné par un
appel. Il y a un appel parce qu’il y a quelqu’un qui appelle. Et cet appel est
basé sur la promesse « sois sans crainte… ! » ; la promesse
de celui qui ne nous abandonnera jamais ; la promesse selon laquelle nous
sommes des pécheurs des hommes. Nous sommes destinés à construire l’humanité, à
élever nos frères et sœurs à la dignité
des enfants de Dieu.
l'amour désintéressé |
Il y a une semaine, une jeune dame est venue chez
nous. Elle a posé cette question à un confrère qui était à l’accueille :
« Est-ce qu’il y a un prêtre efficace ici, un prêtre guérisseur? La
réponse de mon confrère était négative.
La femme est partie sans rien trouver ce qu’elle cherchait. La renommé,
peut-être, du soit disant guérisseur qui l’aurait poussé à venir au presbytère.
Depuis le dimanche passé, nous avons commencé la
lecture de l’évangile selon st. Luc. Celui d’aujourd’hui que nous venons
d’écouter est la suite du passage du dimanche passé qui s’arrête à la
déclaration de Jésus : « Aujourd’hui s’accomplie à vos oreilles
la parole de l’Ecriture ». En disant cela, Jésus voulait dire que Dieu ne
s’enferme pas dans la bible, mais il est maintenant à notre rendez-vous.
Nous sommes souvent curieux du retour d’un
familier ou d’un fils du village après son long voyage ou son long séjour en
étranger. Généralement, la curiosité et l’affection que nous avons de lui qui
nous poussent à aller le voir. Nous voulons savoir qu’est-ce qu’il est déjà
devenu. La renommée de Jésus est arrivée aux oreilles de ses proches, des
villageois de Nazareth. Son retour au village après 40 jours au désert et un
petit séjour en Galilée, et tout ce qu’il faisait dans cette région, nous
expliquent suffisamment pourquoi il y avait du monde dans la synagogue. Sa
renommée, cependant, est confirmée par son autorité avec laquelle il a lu le
passage du prophète Isaïe. Mais, sa reconnaissance de cette renommée est
partielle parce que la foule attendait toute une autre chose. Qu’est-ce qu’elle
attendait alors exactement ? La foule s’attendait que Jésus ait fait les
mêmes miracles qu’il opérait ailleurs. Le fait que Jésus jusqu’alors n’opérait
aucun miracle à Nazareth, pour la foule, était un échec. Par conséquente, elle
cherchait à tout prix la cause. Et voilà le résultat, les gens de la foule se
posaient cette question « N’est-il pas le fils de Joseph, celui-là ».
Si nous étions là, nous pourrions ajouter, peut-être d’autres commentaires, par
exemples : Ah…nous avons compris pourquoi il est aussi nul que ses
parents», ou bien encore; « C’est sûr qu’il est parti gaspiller le
temps et l’argent de son père ».
La réaction de Jésus n’est pas moins surprenante
lorsqu’il visait leur intérêt caché. Il comprenait ce qu’ils attendaient de lui
en évoquant la diction populaire « médecin, guéris-toi, toi-même ». En
fait, en leur rappelant la diction, Jésus démontre combien le sens de la
diction est déjà perverti par leur intérêt. Le sens originel de la diction
devrait être celui-ci : avant de faire des reproches ou des critiques à
quelqu’un, il faut d’abord prendre conscience de ses propres défauts. Les
nazaréens, quant à eux, ont perverti le sens originel de la diction en faveur
de leur intérêt sectaire, nationaliste, celui de nourrir leur besoin et celui
d’enfermer Jésus dans leur jeu de partisan.
Encore cette fois-ci, au moment où la foule
voulait l’imiter l’action de Jésus dans sa patrie, Jésus refusait d’être
privatisé. Il leur rappelait que «aucun
prophète n’est bien reçu dans sa patrie ». Pourquoi ? Parce que la
véritable patrie des prophètes n’est pas de ce monde. Un prophète vient de Dieu.
Il n’est ni un produit du charisme, ni celui du complot humain. Sa patrie est
Dieu lui-même et le monde entière. En rappelant encore l’histoire du prophète
Elie et Élisée, tous les deux opérèrent les miracles aux pays païens, Jésus
affirmait l’universalité du salut qu’annonçaient les prophètes.
La réponse de Jésus fait objet ensuite de son
exclusion. La foule réagissait en le poussant hors du village. Donc Jésus était
chassé de Nazareth. Pour la deuxième fois, Jésus est arraché encore de son pays.
La première fois, c’était au lendemain
de sa naissance lorsqu’Hérode fut à la recherche de le tuer. Il n’est plus ni
Juif, ni Nazaréen. La conclusion de ce récit est très belle. Luc nous dit que
Jésus « allait son chemin ». Il ne peut pas parcourir le chemin du
tribalisme, du nationalisme, ou encore du continentalisme, etc. « Il
allait son chemin », c'est-à-dire, le chemin qui n’est pas celui de notre
intérêt. Jésus s’est dénationalisé ou s’est dépaysé.
Ce passage doit interroger notre manière de vivre
la foi chrétienne. Est-elle une recherche d’intérêt ? Devenons-nous
chrétiens tout simplement parce qu’il a des messes de malades ?
Allons-nous à l’Église tout le dimanche parce qu’on y découvre la prière de
délivrance ? Que cherchons-nous exactement ? Dieu, ou bien des
choses ? Dieu, est-il encore notre bien Aimé, celui que notre cœur aime ?
La manière dont nous entretenons la relation avec Dieu affecte sans doute notre
relation avec nos prochains. Si nous
traitons Dieu comme objet de notre intérêt, nous entretenons aussi nos proches
comme un objet. Nous les aimons parce que nous attendons quelque chose de leur
part.
Vivre la foi chrétienne c’est vivre la
foi nourrie de deux choses. La première, c’est un amour désintéressé qui exige
que nous nous dégagions de notre intérêt égoïste. Cet amour nous aide à notre
tour à nous centraliser, à nous dépayser, à nous détribaliser. La foi en Jésus est incompatible avec toute
sorte d’idéologie y compris l’idéologie de guérison, selon laquelle la guérison
est le centre de notre quête spirituelle. Je vous rappelle, dans les évangiles,
dans chaque cas de guérison, Jésus opérait tout d’abord la guérison
spirituelle, et après vient la guérison physique. Ce qui pratique un amour
désintéressé envers Dieu et son prochain, est déjà disposé à la grâce de
guérison spirituelle, et pourquoi pas la guérison physique. Deuxième, cet amour
est vécu dans la durée. La durée nécessite une attitude de patience et de confiance
à un Dieu qui connaît tout ce dont nous avons besoins. Un cœur qui aime Dieu d’un
amour confiant et patient est un cœur qui accueille l’autre du même amour. Lorsque
on ne cherche que son propre intérêt, et non pas d’aimer Dieu d’un cœur
confiante et patiente, Dieu va aller son chemin c'est-à-dire il n’est plus chez
nous. Si on n’arrive pas à laisser Dieu s’installer chez nous, on n’arrive pas
non plus à faire l’autre se sentir chez lui.
Libellés : de l'idole à l'icon, l'amour désintéressé
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