Vous entendez parler sûrement du fleuve Ganga en Inde, fameux comme lieu sacré où beaucoup des indiens en particulier les hindous se baignent pour avoir la purification de leurs péchés. La dispersion des cendres dans le fleuve permet aux croyants d’avoir une bonne vie dans le futur et même d’acquérir l’état de délivrance, moksha, c'est-à-dire nirwana. Il est capable de libérer l’âme des défunts. Cette réalité, si présente dans mon enfance lorsque je suivais fidèlement l’épopée Mahabrata télévisé en Indonésie, m’est venue à l’esprit quand je lis et médite le récit sur le baptême de Jésus au fleuve de Jourdain (Mc 9-11).

Jésus aurait été au courant du baptême et de l’activité prophétique de Jean appelé le Baptiste parce que celui-ci proclama un baptême pour la rémission des péchés. Comme nous rapporte l’évangéliste Marc, les habitants de tout le pays de Judée se faisaient baptiser par lui. Et voici Jésus, était le dernier de tous, fait la queue avec ces gens. C’est choquant de contempler Dieu qui se fait pécheur comme nous. Il est derrière nous, comme celui qui veut débarrasser tous le reste. Contemplons comment il s’avance, pas à pas ; traverse les mêmes parcours que les nôtres ; il entre dans le fleuve, ses pieds, il le les mouiller, et enfin une fois arrivé chez Jean, il descende tous son corps dans l’eau déjà coloré de notre saleté sans en oublier les mauvaise odeurs. C’est ici on comprend bien ce que signifie la descente aux enfers du Christ dans notre credo. D’abord cette décente annonce la mort de Jésus, lui qui ayant pris notre condition humain, va subir aussi notre limite humaine dont le sommet est la mort. Il est allé jusqu’à l’enfer de notre liberté humaine : qui nie Dieu et épouse le mal. Hans urs von Balthasar parle de l’action du Christ qui vide l’enfer. Cette descente est donc un acte d’amour de Dieu le Père qui ne veut jamais notre perte.

Après cela, la scène qui devrait nous frapper c’est sa monté de l’eau. Lorsqu’il remontait de l’eau, il voit les cieux se déchirer et l’Esprit comme une colombe descendre vers lui. Ce geste de monté et ces dernières images nous annoncent la nouvelle révélation de Dieu en Jésus. Les cieux se déchirent signifie que désormais Dieu entre dans notre histoire. Il n’est pas inaccessible, il entre dans la communion avec nous tel que le ciel et la terre se communient. Sa monté affirme la résurrection comme son avenir et comme la nôtre. La mort n’a aucune emprise sur lui. Il sera ressuscité des morts et c’est avec Lui que Dieu va nous ressusciter.

La colombe exprime en effet tout ce qui est non-violence, douceur, amour, pardon et tendresse. Elle est la seule parmi tous les oiseaux que l’on juge digne d’être offert en sacrifice, surtout dans le monde juif. Elle nous rappelle donc la mission d’amour, de faiblesse et de sacrifice. Elle manifeste un acte non violence de Dieu. Le royaume de Dieu que Jésus nous instaure loin du projet d’occupation Israël à la terre promise sous la conduite de Josué. Le fleuve Jourdain était la seule étape à franchir pour pouvoir arriver à Jéricho perçu déjà par le peuple. En Jésus, c’est le monde à conquérir par l’amour et le pardon.

Et finalement des cieux déchirés une voix proclame : « C’est toi mon fils, en toi j’ai mis tout mon amour ». C’est une phrase d’intronisation royale, cité par Marc pour affirmer la mission de Jésus qui instaura le Royaume de Dieu parce que lui-même est le Roi. Elle affirme ensuite à la fois l’identité et la vocation de tous les baptisés : c’est de collaborer dans la mise en place du royaume étant fils du même Père. Si nous creusons encore de manière plus profonde cette phrase, nous nous rendons compte que c’est à nous que cette phrase est destinée, à tous ceux qui lisent l’Evangile. Jésus se fait comme nous, nous donne sa vie jusqu’à la mort parce que lui, il est aimé de Dieu et parce que il est capable d’aimer. Suivre Jésus est une vocation de don et d’abandon. Nous sommes appelés d’être comme lui, d’être un don au monde, comme témoins de tendresse, d’amour, de pardon, d’accueil, de non violence. Devenir un don nous demande une attitude d’abandon. Comme Jésus qui abandon son rang qui est égal à Dieu pour être comme nous, notre baptême nous demande d’abandonner notre égoïsme, d’abandonner notre autonomie et autosuffisance, et surtout notre mal pour pouvoir accueillir nos frères et nos sœurs de manière authentique. Le baptême de Jésus nous fait assumer le monde où nous habitons comme un lieu de fraternité où l’amour doit régner. Notre abandon n’est possible qu’à grâce à l’abandon de Jésus. Donc nous sommes capables d’aimer parce tout d’abord nous sommes déjà aimés par Dieu en Jésus. Parce que nous sommes capables d’aimer et d’être aimés, donc nous sommes capables aussi de nous abandonner. C’est la primauté de la vocation baptismale.

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