La Beauté d’une fin

s'ouvrir à la rencontre
Aux pays du nord, on sait que lorsque les arbres à feuilles caduques passent en dormance sous le ciel sombre caressé par le vent et la pluie, c’est l’automne qui s’annonce. Tout semble mourir, partir sans plus revenir.  Aux pays du Sahel ou ceux du climat désertique, pendant la saison sèche tout est sec : la terre brisée, les herbes disparaissent, les animaux maigrissent et même meurent assoiffés, les gens mangent peu pour ne pas mourir affamés parce que rien ne pousse. La condition climatique de ces deux milieux influence sans doute la manière de vivre de ceux qui s’y trouvent pour pouvoir survivre. Ce qui est commun c’est la présence de la réalité de la finitude. La fin est inscrite dans notre histoire justement pour caractériser sa caractéristique progressive. Notre histoire marche ou s’orient en progrès, c'est-à-dire vers l’accomplissement. Elle n’est pas statique, ni circulaire ou rotatoire telle qu’on trouve chez les bouddhistes. Cette vision de l’histoire doit ou prend son origine de la révélation chrétienne selon la quelle Dieu s’est incarné dans l’histoire pour l’’amener à l’accomplissement à travers la vie, la mort et la résurrection du Jésus Christ.  Dieu des Chrétiens n’est pas dieu ex machina (hors de l’histoire) ou le spectateur après son ouvre créatrice.
La fin est terrifiante, effrayante, et angoissante parce qu’elle nous arrache souvent de la trajectoire que  l’on n’a pas encore achevée. Que l’on veule ou non, elle est indissociable de notre histoire.  Au terme de chaque année liturgique, l’Eglise nous propose des lectures relatives à la fin du temps. Aujourd’hui dans l’évangile selon st. Marc (13, 24-32), Jésus en parle moyennant deux illustrations. La première nous fait horreur. Il est vrai pour ses auditoires ou ses contemporaines les images dont il se servait pour parler de la fin du temps sont des images familières pour les juifs. Il s’agit en effet d’un langage eschatologique, un procédé littéraire plein d’images cosmiques, d’énigmes et d’épreuves souvent inattendues et dramatiques. Attention ! Il ne faut pas prendre son signification au pied de la lettre. Le contexte dans le quel ce discours a été écrit est important à connaître. Marc adresse son évangile à l’Eglise de Rome persécutée après la destruction du temple de Jérusalem qu’il considérait comme étant révélatrice du signe de la fin des temps. Il voulait encourager les chrétiens de pouvoir découvrir la gloire et la victoire du Christ après la tribulation et de se garder des faux Messies.
La fin des temps a un double sens. Le premier est l’accomplissement, le deuxième le commencement nouveau. Les paysans se donnent d’abord le temps et la peine pour labourer, cultiver la terre avant de moissonner ou récolter les fruits de ce qu’ils y sèment. La peine ou la souffrance s’inscrit dans notre vie quotidienne, faisant partie de la trajectoire vers le bonheur ou le réussit. Le progrès du monde que nous connaissons maintenant, n’est-il passé par les moments difficiles de notre histoire : les conflits et les guerres ; les révolutions industrielles, politiques et économiques. Pour Marc la venue victorieuse du Christ est précédée d’abord par la tribulation. Cette dernière commence par la mort du Christ comme étant marque initiale du nouveau commencement. L’évangéliste invite ses lecteurs à mettre plus d’importance à la venue du Christ qu’à la souffrance qui la précède.
Peut être on se demande pourquoi la guerre ne finit jamais et la violence continue. Voir ce qui s’est passé au Japon lors du tsunami, en Syrie avec la guerre infinie et actuellement le nouveau conflit arabo-Israël fait penser certains d’entre nous d’accepter la soi-disant la fin des temps en 2012 telle que les sectes millénaristes annoncent. D’ailleurs il en est sorti un film du même titre. Pour ceux qui l’ont déjà vu des films de tel genre, il est évident qu’il s’agit de la plaisanterie bonne marché dû à la lecture fondamentaliste et fragmentaire de la bible. L’unité du message n’a pas été découverte. Ils se concentrent tellement sur des images terrifiantes, comprises à la lettre, qu’ils oublient le reste. L’image du soleil et des anges soulignent la nouveauté de l’histoire. Ces images interviennent après la tribulation pour nous présenter la nouveauté qui dépasse même l’histoire : parce que nul ne connaît quant au jour et à l’heure sinon le Père.  L’évocation de la venue du Fils de l’homme, inspirée de la vision apocalyptique de Daniel (7, 13-14) met en évidence la maitrise de l’histoire qui appartient à Dieu.
La fin des temps ne nous appartient pas. C’est un don qu’il faut demander à Dieu, le maitre de l’histoire. Nous sommes inquiètes et préoccupés des situations de crises, de guerres et de conflits dans notre monde aujourd’hui. Nous sommes invités à participer à leur solution. Nous ne pouvons croiser les bras, ni seulement prier sans faire des efforts de sauvegarder la paix et la réconciliation dans notre propre milieu. Il faut aider nos prochains, nos voisins ou nos amies de différentes ethniques et religieuses à ne pas être prises de toute sorte de provocations derrières ces conflits. Si l’accomplissement de l’histoire doit être d’abord précédé par la douleur et la souffrance, cela signifie que Dieu veut que tout d’abord on sanctifie et sauve cette histoire, que l’on soit prêt de l’accueillir pas seulement dans un cœur pur et saint mais dans nos sociétés de paix et de véritable fraternité. Si on n’est pas encore prêt intégralement,  Dieu ne peux pas venir accomplir l’histoire. Attention ! Autre chose dire Dieu ne peut pas venir quand on n’est pas prêt, autre chose dire Dieu ne peut pas venir quand on ne veut pas être prêt. Le premier met en accent sur la participation, la responsabilité de l’homme. Le deuxième n’est pas une opposition au caractère inattendu et immaitrisable de cet événement. Il souligne plutôt l’irresponsabilité et le rejet de l’homme au don gratuit du salut.
La beauté de la fin des temps se trouvent dans le fait que la fin donne des limites qui ordonnent à leur tour la forme de la réalité de l’histoire. Sans  la limite ou sans la fin, la vie n’est pas complète. Accepter la fin c’est s’ouvrir à la rencontre véritable avec Dieu, le maître du temps. Il en va de même lorsque on accepte ses limites, on s’ouvre à la maturité parce que ses limites-là nous amènent à la rencontre et à la relation avec autrui qui comble nos limites avec ses richesses. Parce que la vie comme un don ne nous appartient pas, mais appartient à Dieu, nous sommes appelés à donner la vie pour les autres parce qu’ils ont le droit de rencontrer Dieu et de posséder l’avenir.




RIRE AU JOUR A VENIR

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Entre le présent et le futur, l’aujourd’hui et demain, s’installe dans notre existence, une sorte de trou noir qui absorbe toute notre énergie.  Ce trou noir est en fait notre inquiétude. L’avenir nous préoccupe et c’est clair. Parce que nous ne vivons pas seulement pour aujourd’hui à la manière épicurienne, que l’on cherche à tout prix à prédominer l’angoisse de l’avenir. Le travail y trouve sa place.  Le mot travailler (en latin laborarer) au début s’associe plus au mot labourer dans milieu agriculture. On laboure la terre en espérant qu’elle puisse faire produire en abondance ce qu’on va y planter. La richesse se décline donc normalement du travail, elle a la raison d’être en tant que fruits de nos peines de travail.
Jésus dans le passage de l’évangile de ce dimanche ne critique pas la richesse, ni les riches, ni non plus la pratique de don ou de quêtes dans le culte. Il veut remettre le sens de la richesse à sa place. Où est-elle ? Pour nous y amener, Jésus profitait des  habitudes que tout le monde de son temps pouvait observer dans le temple. C’est vraiment normal de voir les scribes se promener en longues robes, recevoir les salutations sur les places publiques et occuper les premières places publiques dans le festin et dans les synagogues. Ces habitudes sont normales parce que dans une société quelconque chacun a son rôle social à jouer. Jésus ne le conteste point, mais ce qui n’est pas normal de ce rôle qui fait objet de sa critique virulente. Dans son observation ce rôle a été instrumentalisé pour l’intérêt des scribes. Il frappe dur alors lorsqu’il disait qu’il fallait se garder  de scribes qui, ayant leur  rôle, dévorent les biens des veuves (cf. Mc 12, 38-40). Il y a le détournement, brève la corruption. Jésus dévoile justement ce qui est caché.
Sa diagnostique se poursuit avec une autre observation, celle de la fréquentation de la foule au tronc du Trésor. Dans l’enceinte du Temple juif jadis, se trouvait la salle du Trésor équipée d’un tronc extérieur pour recevoir les offrandes. Ils avaient beau voir des gens mettre les offrandes, il y a une personne qui échappait à leurs yeux. C’était une veuve pauvre, peut-être faisant partie des pauvres, ils n’étaient plus à l’affut de sa présence dans le temple. Elle est survenue discrètement mettre ses deux piécettes d’argent. Cette discrétion attirait l’attention de Jésus au moment où son discours précédent aboutissait à la découverte du criminel et de la victime de l’injustice des scribes. La victime est la veuve. Elle devient maintenant le centre d’attention et le point de repère : voyant la veuve, Jésus dit « En vérité, en vérité, cette veuve, qui est pauvre, a mis plus que tous ceux qui avaient mis dans le Trésor ». Quantitativement, ça ne va pas. Jésus explique le pourquoi. « Elle don de son indigence, de ce qu’elle avait pour vivre, alors que les autres mettent de leur superflu » ( Mc 12,43-44).
Jésus, je le crois bien, renverse discrètement le sens du Trésor. Ce dernier n’est pas une boîte, ni une caisse, ni un édifice de don ou de richesse Le Trésor cette fois ci est Dieu lui-même. Pour Jésus, ce qui compte le plus c’est le cœur de celui qui donne et non pas la quantité. Il corrige l’attitude qui consiste à se faire remarquer. La veuve a montré comment on doit entretenir une relation véritable avec Dieu, c’est de se confier totalement en Lui, de lui donner tout ce que l’on a pour vivre.  C'est-à-dire tout ce qui nous  est chère. Cela dit que l’on doit dépasser nos angoisses ou nos inquiétudes de l’avenir en se jetant dans les bras de Dieu, comme Abraham lors du sacrifice d’Isaac : Dieu pourvoit tout ! Il faut nous dessaisir de nous-mêmes. Le trou noir doit  être recouvert par notre foi en Lui.
Pour moi, la veuve met en scène la figure de la femme maitresse dont parle le livre de proverbes. « Force et dignité forment son vêtement, elle rit au jour à venir » (Pr 31,25). La veuve n’est pas vêtue de la belle ou de la longue robe, mais de la dignité et de la force grâce à sa foi en Dieu. Rire est un acte de foi. Dans le monde marqué par la prédominance de la quête de la richesse et du pouvoir, la foi coûte chère ; comme si l’avenir était conquise par l’intelligence de l’homme. L’avenir ne nous appartient pas. Il appartient à Dieu d’abord. La foi nous fait peiner aujourd’hui, mais elle nous fait rire au jour à venir. L’avenir est un don qu’il faut demander avec la foi. (Tardelly,sx)

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